Iran: une proposition de dialogue entre les forces de gauche
Summary: The situation facing Iran and the left after the US bombing — Editors
English version here — Editors
Iran: une proposition de dialogue entre les forces de gauche
Le gouvernement américain a annoncé que ses frappes aériennes contre les installations nucléaires iraniennes de Fordow, Natanz et Ispahan avaient été menées « avec succès », entraînant leur destruction. Cette affirmation a toutefois été accueillie avec scepticisme par de nombreux experts, dont beaucoup affirment que l’opération n’a pas atteint ses objectifs. Quoi qu’il en soit, par cet acte, les États-Unis se sont effectivement joints à Israël dans sa campagne militaire contre l’Iran.
Au-delà de la question de savoir ce qui est précisément arrivé aux installations d’enrichissement de Fordow et Natanz, il faut se demander : si ces sites ont effectivement été détruits, comment expliquer la poursuite des attaques ? Pourquoi Israël insiste-t-il sur le fait que ses « opérations militaires contre des cibles stratégiques se poursuivront » ? En d’autres termes, quel est l’objectif final ?
L’objectif des États-Unis et d’Israël en bombardant les infrastructures militaires et économiques est-il de renverser la République islamique ? Les deux dernières décennies de l’histoire du Moyen-Orient suggèrent le contraire. Les régimes ne s’effondrent pas uniquement à cause des bombardements aériens et du sabotage. Sans présence militaire sur le terrain, le changement de régime reste difficile à réaliser. En fait, à chaque nouvelle frappe, l’appareil répressif se renforce, la dissidence civile est davantage réprimée et les fractures au sein de la classe dirigeante se réduisent. La force matérielle nécessaire pour renverser un régime ne réside pas dans les missiles, mais dans les soldats qui s’emparent du pouvoir et l’exercent. Il suffit de regarder le sort de l’Irak, de la Libye et de la Syrie.
Se pourrait-il alors qu’Israël espère provoquer un soulèvement populaire, afin que, dans le chaos, les masses mécontentes se soulèvent et renversent le régime ? Mais cela aussi est illusoire. Dans la pratique, ces attaques ont provoqué une peur généralisée et des déplacements de population. En temps de guerre, les personnes ont tendance à perdre leur sens de l’initiative ; leur dépendance vis-à-vis de l’État central pour se nourrir, s’approvisionner en eau et assurer leur sécurité ne fait que croître. Même dans les pays où les mouvements syndicaux, les partis politiques, les syndicats et les conseils sont puissants, la première réaction à la guerre est souvent la peur, et non la rébellion. Les citoyen·es se rallient à l’État au nom de la sécurité. Les protestations ne surviennent que plus tard, lorsque le coût économique, l’insécurité et l’absurdité de la violence deviennent indéniables la guerre en Russie a commencé en 1914, mais les soulèvements de masse ont eu lieu en 1917 ; en Allemagne, en 1918. Dans la plupart des pays, ce n’est qu’entre 1917 et 1919 que la résistance a véritablement émergé, et cela dans le cadre de guerres entre puissances impériales, et non de conflits asymétriques comme celui auquel nous assistons actuellement.
Nous sommes confronté·es à la dure réalité que les puissances impériales – les États-Unis et l’Israël sioniste ne cherchent pas simplement à changer le régime en Iran. Leur objectif plus large est d’éliminer l’influence régionale de l’Iran et de démanteler l’action collective de la population diversifiée du pays. Cela signifie la destruction non seulement des infrastructures militaires, mais aussi des capacités sociales, économiques et politiques de l’Iran, afin de le réduire à un micro-État fragmenté, comme l’Afghanistan ou l’Irak, et de le retirer de l’équation régionale. L’objectif n’est pas seulement la fin de l’hégémonie idéologique de la République islamique, mais aussi l’effacement du rôle régional de l’Iran et de tout potentiel d’émancipation qui pourrait émerger contre le régime actuel.
Il est tout à fait clair que la chute de la République islamique n’apportera pas d’alternative démocratique ou progressiste. Les soi-disant alternatives existantes, telles que Reza Pahlavi et son entourage réactionnaire, manquent à la fois de volonté et de capacité à diriger. Les réformistes, malgré leur présence organisationnelle, ont perdu toute crédibilité et font toujours partie de l’appareil du régime. Les forces de gauche et les mouvements syndicaux ou politiques, quant à eux, sont actuellement trop dispersés et trop peu nombreux pour exercer une influence significative. Si l’effondrement de la République islamique et de ses institutions devait se produire, nous n’assisterions même pas à la naissance d’un ordre capitaliste, mais à une descente dans le chaos : une société fragmentée, des seigneurs de guerre locaux, des conflits régionaux et une période prolongée de désordre et de désintégration.
Alors, que pouvons-nous faire, en tant que gauche fragmentée et affaiblie, dans ces conditions ? Des décennies de sectarisme, d’illusions, d’incapacité à saisir les réalités en mutation et d’illusions d’émancipation nous ont marginalisés par rapport aux véritables luttes sociales de notre époque. Nous n’avons même pas réussi à construire un front anti-guerre des forces progressistes unies autour de revendications concrètes. Et pourtant, nous sommes aujourd’hui confronté·es à la plus grave des crises. Si nous ne parvenons pas, en coordination avec la gauche régionale, à former un front uni ; si nous nous accrochons à des illusions et ne parvenons pas à mettre en commun nos ressources limitées avec celles des autres acteurs et actrices de la région, alors dans les temps tumultueux et imprévisibles qui s’annoncent, non seulement la gauche disparaîtra, mais il ne restera probablement plus rien qui puisse être qualifié d’humain. Les petites graines de libération qui existent encore, dispersées un peu partout, seront étouffées. Nous sommes peu nombreuses et nombreux. Mais reconnaître notre faiblesse ne nous condamne pas à l’insignifiance pour toujours. Ce qu’il faut, c’est une action décisive pour nous rassembler. Sans cela, notre marginalité deviendra extinction. L’histoire n’attend pas. Le vide que nous laisserons sera rapidement comblé. Et il ne restera peut-être plus qu’à pleurer la perte de l’humanité et de la libération.
Hassan Mortazavi
Hassan Mortazavi est le traducteur du Capital et d’autres ouvrages marxistes en persan.
https://imhojournal.org/articles/iran-a-proposal-for-dialogue-among-the-leftwing-forces/
Traduit avec DeepL.com (version gratuite)
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